Gilberte de Courgenay renaît sur la scène du Theater Neumarkt à Zurich

wpbot_image_u6AKqe

Contexte et origine de la légende de Gilberte de Courgenay

Il était une fois une serveuse de l’hôtel de la gare de Courgenay nommée Gilberte Montavon, réputée pour entretenir morale et bonne humeur parmi les mobilisés pendant la Première Guerre mondiale. À l’époque, la Confédération était confrontée à des tensions entre Romands francophiles et Alémaniques alignés sur le Kaiser.

Du village à la scène : l’itinéraire d’un personnage devenu mythe

La figure de Gilberte est devenue source de chanson populaire, puis sujet d’une pièce écrite par le Bâlois Rudolf Bolo Mäglin et d’un roman consacré à son histoire. Le réalisateur bernois Franz Schnyder porte cette matière au grand écran, contribuant à forger le mythe de « Gilberte de Courgenay ». Sous l’interprétation d’Anne-Marie Blanc, qui incarne une Gilberte blonde lors de l’adaptation cinématographique sortie en 1941, le personnage participe à la montée du moral et du patriotisme en Suisse.

Une mémoire évolutive et des résonances diverses

Aujourd’hui encore, l’écho de la chanson se décline différemment selon les publics : pour certaines oreilles alémaniques, le refrain peut être reconnu, tandis que la diffusion au Léman peut apparaître plus ambiguë. À Courgenay, aujourd’hui rattachée au Jura, Gilberte demeure une héroïne locale, même si les tombes de la véritable Gilberte et de son interprète reposent en terre zurichoise.

Une première mise en scène germanophone

Pour sa première mise en scène en allemand, le metteur en scène Mathieu Bertholet, passé par le Théâtre Le Poche de Genève et désormais à la tête du Theater Neumarkt à Zurich, choisit d’évoquer Gilberte. Il décrit l’idée comme une blague de fin de soirée qui s’est révélée être devenue une proposition concrète : Gilberte serait, en quelque sorte, un miroir de celui qui raconte l’histoire, avec pour objectif de relier les publics romand et alémanique.

Un cabaret bilingue et satirique sur la scène zurichoise

Au Neumarkt, la figure de Gilberte s’ouvre sur une entrée chorégraphique et cabaret. L’équipe réorganise l’espace du café, arrange tables et chaises et multiplie les clins d’œil au répertoire musical et humoristique, avec des références à des saveurs emblématiques et des accents helvétiques qui traversent les scènes, notamment dans des costumes évoquant les conscrits et des touches d’érotisme feutré. Le spectacle s’inscrit dans une veine qui rappelle le cabaret de Weimar et propose des airs et des passages qui croisent les origines valaisannes et les influences helvétiques.

La pièce alterne les langues et s’appuie sur des performances collectives, avec des passages qui évoquent l’histoire de Gilberte en lien avec le film de Schnyder, diffusé sur deux anciens postes de télévision. Régulièrement, le texte invite à réfléchir sur l’identité suisse, la crainte de l’étranger, le surtourisme et les fortunes qui bordent les bords des lacs.

Ainsi, comme dans l’histoire initiale, Gilberte finit par renoncer à un amour pour Hasler, un compagnon promis à la fiancée Tilly, avant de revenir sur scène sous diverses perruques et foulards, portée par la troupe dans un final qui invite à une lecture nuancée des identités et des rapports linguistiques et sociaux.

Calendrier et visibilité

Cette reprise est présentée au Theater Neumarkt de Zurich et est programmée jusqu’au 17 janvier 2026, offrant une perspective renouvelée sur une figure emblématique de la culture suisse.